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Un amour fictif
16 septembre 2009

The Proposal - La proposition

Film écrit par Pete Chiarelli, réalisé par Anne Fletcher

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Résumé :

Une patronne tyranique travaillant dans le milieu de l’édition, Margaret Tate (Sandra Bullock) doit épouser son assistant-larbin, Andrew Paxton (Ryan Reynolds)  pour ne pas être expulsée des Etats Unis. Elle se voit contrainte par l’agent de l’immigration, M. Gilbertson (Denis O’Hare) de partir avec lui voir sa famille en Alaska, afin de prouver qu’ils forment un véritable couple à ses yeux. Vont s’en suivre une suite d’aventures et de quiproquos rocambolesques qui vont, finalement, resserrer les liens entre les deux protagonistes qu’au départ tout oppose.

Ce film semble être à la base destiné à un public féminin, de part le sujet du mariage, du prince charmant, de la présence d’un bel acteur et du personnage principal qui se fait ridiculiser de bout en bout. Cependant, le long métrage est rempli de clichés, de poncifs et il remet la femme « à sa place », celle que lui accorde nos sociétés actuelles.

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Présentation du couple vedette

 Margaret Tate

Margaret est une éditrice en chef exécutive d’une compagnie d’édition de livres, Colden Books à New York (elle est d’origine canadienne). C’est une brune dynamique, sachant ce qu’elle veut, qui cache ses émotions et toutes ses faiblesses. Ce qui en fait, au regard de ses employés, un personnage désagréable et mal vu : elle les a ligués contre elle.

Son assistant, Andrew Paxton, lui est entièrement dévoué, bien qu’il soit un authentique goujat derrière son dos.

Cependant, elle reste conciliante envers ses employés. Par exemple, elle a sous ses ordres Bob Spaulding, qui travaille dans la com et la publicité. Alors que ce dernier se repose sur ses acquis – un auteur, Frank, n’a plus donné d’interview depuis 20 ans, ce n’est donc pas la peine de l’appeler pour qu’il décline l’offre – Margaret, dynamique, négocie avec l’écrivain pour qu’il revienne faire la publicité de son livre et… a des résultats positifs : Bob est contre performant.
De plus, il rempli son bureau d’antiquités, il possède plein de bagues, et une montre en or. C’est un homme futile : il parle de son dernier achat comme d’une voiture.
Sa contre performance oblige Margaret à le licencier, mais, conciliante, elle lui propose une alternative pour ne pas entacher son CV à l’avenir.

Se voyant exposé à une expulsion, elle décide de se marier à un américain, le premier qui se présente à ses yeux : Andrew, qui ne la supporte pas. Une fois cette première étape franchie (création forcée d’un couple), Margaret va avec Andrew au centre d’immigration pour officialiser sa relation. Elle a une attitude assez dénigrante, vis-à-vis des autres immigrés devant qui elle passe sans même s’excuser. Tout le temps au téléphone, suivie par Andrew comme si elle faisait du shopping.

Pour officialiser sa relation au vu de M. Gilbertson de l’immigration, Margaret devra répondre à un interrogatoire sur Andrew, auquel il doit y avoir 100% de bonnes réponses. Afin de savoir le maximum sur lui, elle l’accompagne en Alaska, dans sa famille. Comme ils se regardent comme chiens et chats, Andrew ne lui dira d’abord rien sur lui. Elle sera forcée de tout découvrir par elle-même : c’est le début de la grosse comédie. Dès lors, elle apparaît stupide : alors qu’elle tique lorsqu’Andrew lui dit qu’ils vont en Alaska (état le plus froid des USA), elle y va avec des talons aiguilles de 50cm, des nuisettes…

Au fil des épreuves qui l’attendent en Alaska, elle va tomber vraiment amoureuse d’Andrew. Vers la fin du film, Margaret prise de remords, annule le contrat la liant à Andrew (le mariage factice) et accepte son expulsion.

 Andrew Paxton

Au début de l’histoire, Andrew hait sa patronne, et lui envoie des poignards dans le dos : il écrit à ses collègues, via la messagerie instantanée sur son ordinateur des phrases du type « la sorcière enfourche son balais », et avouera plus tard à Margaret ses envies de la voir morte dans d’atroces souffrances.
A la sortie des bureaux de l’immigration, il tentera de prendre les choses en main en la faisant se mettre à genoux en pleine rue alors qu’elle porte une jupe très serrée et des talons aiguilles qui limitent ses mouvements. Bien sur, ayant obtenu une compensation pour son aide, il ne l’aidera pas à se relever et la laissera là.
En Alaska, il dira à son père qu’il apprécie son métier, et que ça ne le dérange pas d’être le larbin de sa patronne.
Cependant, il restera assez froid avec elle, même si l’on sent une évolution dans ses sentiments. Il la trouvera attendrissante avec le chien, mais il reste dans son rôle d’homme, car il masque ses sentiments (la mère et la grand-mère nous les expliquent), prend les initiatives et va jusqu’à lui caresser les fesses.
Dans la troisième partie du film, alors qu’il cherche Margaret pour lui avouer son amour, il la trouve en train de faire ses cartons au sein de son entreprise. Il n’hésite pas à se poser en maitre face à elle, au milieu de ses collègues.

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L’humiliation

Dans la ville de Sitka, Alaska, elle se fera rabaisser, parce qu’elle ne connait pas les us et coutumes des habitants bien loin des habitudes new yorkaises. Elle se retrouvera malgré elle dans des situations  cocasses la plupart du temps, provoquées par la famille d’Andrew.

Premier exemple : le chippendale. Un émigré bien portant, Ramone, dont la gentillesse extravertie a été mise en valeur, fait un mélange de lovedance (danse du ventre) et striptease. Margaret est amenée sur scène, avec une coiffe de mariée, sur la chaise autours de laquelle Ramone gesticule. Ce chippendale se rapproche de quelque chose d’animal où le mâle séduit la femelle. La façon dont la scène a été filmée, la pudeur de Margaret, l’ambiance du bar, tout ceci montre que finalement, Margaret, sous ses grands airs, est un personnage « coincé » aux yeux de la mère et de la grand-mère d’Andrew.

Deuxième exemple : l’opposition entre Margaret et Gertrude, ex d’Andrew. Physiquement, elles sont très différentes. Gertrude est blonde platine, grands yeux bleus, visage lisse et carré et poitrine imposante. Andrew lui a déclaré sa flamme et lui a proposé de partir à New York mais elle n’a pas accepté, arguant qu’elle ne s’imaginait pas vivre ailleurs.
Cependant, l’ex qui est invitée au mariage par la famille d’Andrew ne sème pas la zizanie au sein du couple, alors qu’on pourrait s’attendre au contraire. Son rôle est à peine développé et reste très fade. On aurait pu s’attendre qu’elle mette en valeur l’amour de Margaret pour Andrew autrement qu’en étant gentille avec elle (« crépage de chignons »…)

Ces deux exemples étaient pourtant dignes d’être développés. En supposant que Ramone soit un archétype du bel homme qui se déplace, voyage de ville en ville, le cœur de Margaret aurait eu possibilité d’hésiter entre lui et Andrew… tandis que celui d’Andrew, d’abord partant pour se rabibocher avec Gertrude, aurait finalement penché pour Margaret. Ce tourbillon amoureux aurait été digne d’un Cosi fan Tutte (livret de Da Ponte, orchestration de Mozart).

Spectateur, spectatrice

 mise en valeur de la spectatrice par rapport à l’héroïne

A partir du moment où Margaret s’agenouille pour demander Andrew en mariage, elle ne subira que des humiliations. Grassement servie par le scénariste (et la réalisatrice), elle devra se relever avec des talons aiguilles et une jupe serrée, marcher avec ses mêmes chaussures sur des graviers, tout en tirant une énorme valise, elle va se montrer à la limite de l’hystérie pour récupérer son portable qu’un aigle lui a pris… se faire traiter de féministe et d’autres noms d’oiseaux (sale garce), alors qu’il ne s’agit que d’une femme qui prend sa vie en main.
La caricature qui est faite de cette femme d’affaire est là pour flatter la spectatrice :  la fille est tout le temps  humiliée, afin de montrer qu’elle est plus forte que ce personnage.

 rassurer le copain de la spectatrice

Le copain de la spectatrice, homme à qui le film n’est pas directement destiné, voit à première vue l’histoire d’un homme, dominé par une femme. Cet homme finit par ordonner à Margaret de se la « fermer » avant de faire sa déclaration en bonne et due forme, mais sans se mettre à genoux.
De plus, il y a certains plans  sur les fesses de l’héroïne, ainsi qu’une scène de nus, le flatte. A la fin du film, le spectateur peut être rassuré : ce sera toujours à l’homme de prendre les devants.

 La chambre : douillette et à la pointe de la technologie

Un exemple est clair pour rassembler les deux parties : la chambre d’Andrew. Elle est chaude et douillette, et n’a, à priori, rien d’une chambre ‘de mec’. Elle apparait calme et tranquille, et est luxueuse. Tout le confort d’une chambre que l’ont peut voir dans Marie Claire. Sans surprises, Margaret s’y trouve tout de suite bien.
Cependant, nous sommes en Alaska, lieu où le soleil ne se couche pas. Margaret dit ne pas pouvoir dormir avec toute cette lumière. Sans bouger du lit, Andrew attrape une télécommande et ferme les rideaux électriques. Dans un cadre bucolique fait pour la femme, cette once de technologie rassure l’homme. Il a toujours le contrôle.

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stéréotypes

Le film est bourré de clichés et de stéréotypes. Ainsi, la femme, qui est au début forte et qui en impose, tombe amoureuse d’un goujat et devient faible. Lui, asservi au début mais qui montre que cela l’ennuie (messagerie instantanée, etc.) va, au fur et à mesure de l’histoire lui imposer sa famille, ses idées, son point de vue. De plus, au moment de lui faire sa déclaration en bonne et due forme, il ne va pas se rabaisser comme elle à se mettre à genoux.
L’état d’Alaska est présenté comme étant la campagne profonde où tout le monde se connait et est ami, contrairement à la ville de New York où les gens sont froids entre eux. C’est un endroit idyllique, des plaisirs simples, coupés de tout stress et de tout souci.
Gertrude reste une gentille petite blonde (car on sait que ce qui est blond caractérise la douceur et l’angélisme) alors que face à elle se trouve une brune (aventureuse et maitresse d’elle-même). La grand-mère est manipulatrice, exubérante et parvient toujours à ses fins…

 Le prince charmant

Au début du film, Andrew passe pour un pauvre aux yeux de Margaret : il n’a qu’un avantage, celui de sa beauté physique.
Le film commence par parodier la scène du prince charmant à genoux face à la princesse, en inversant les rôles ; puis, le prince charmant emmène la princesse chez lui. Alors qu’il ne s’était pas présenté comme tel, il se trouve que le prince Andrew est issu d’une famille qui a de l’argent. Andrew n’est pas spécialement un mauvais parti. Face à cette belle famille, la princesse Margaret va tomber amoureuse du prince...

La réalisation respecte les bases de la grammaire cinématographique, présentant bien les divers changements d’états des personnages. Elle ne brille pas pourtant d’originalité ni de partis pris. Ceci ancre les stéréotypes.

peur de la domination féminine

La femme fait une chose que l’homme ne peut pas faire : procréer. A partir de cette information, deux points de vue s’affrontent.
Le premier dit que l’homme se doit de protéger la femme, d’où la création de la galanterie et le confinement de ses dernières, entre autre. Le second dit que l’homme ne pouvant procréer, il est donc moins fort que la femme : il doit donc se rassurer en rabaissant la femme, d’où la notion de femme au foyer laissée par le XIX° siècle…

La fiction présente une femme intraitable qui finalement se fait mater par un homme.

Alors que l’on suit Margaret et sa suite d’humiliation durant les deux tiers du film, c’est Andrew que l’on suit à la fin de ce dernier. Curieusement porté par sa famille, il ne subit pas d’autres humiliations que de voir Margaret honnête se sauver (pour repartir dans son pays d’origine). Il prend les choses en main, et s’affirme face à sa patronne.

Les mœurs sont sauves : c’est bien lui qui dirige le couple.

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