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Un amour fictif
16 décembre 2009

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Écrit et réalisé par James Cameron

Dans un futur lointain, où les voyages dans l’espace sont possibles, les hommes veulent récupérer l’Unabonium, un minerai rare, coutant« 20 millions au kilo », qui se trouve sur la planète Pandora, sous un arbre gigantesque où vit une tribu de Na’vis. Mais ils doivent déplacer ces humanoïdes. Pour cela, ils utilisent deux méthodes : celle usant de machines de guerre et une autre, plus pacifique, où ils envoient des avatars de Na’vis, créatures de plus de trois mètres de haut à la peau bleue. Ces corps créés en laboratoire sont pilotés par des humains afin de négocier le départ de ces extraterrestres doués de pensée. Cependant, ces derniers ne désirent pas partir de leur terre sacrée où se trouve « l’arbre maison ». Les Na’vis pensent leur planète et leur tribu comme un tout grâce à un système complexe de réseaux, symbiose du végétal et de l’animal.
Jake Sully, ex-marine qui a perdu l’usage de ces jambes, est affecté à l’un de ces avatars, suite au décès de son frère qui l’animait initialement et à l’investissement qu’à représenté sa création : il a été choisit du fait de son ADN proche. Au début, agent au service de l’armée qui doit délivrer des informations capitales aux hommes afin de permettre la mise à sac de la terre sacrée, Jake tombe amoureux du monde dans lequel il doit négocier, mais aussi de la fille qui l’a sauvé la première nuit. Il se rebelle contre la colonie humaine qui l’a envoyée, et reste définitivement sur cette planète, après avoir bouté les soldats hors de Pandora.

D’une durée totale de 2h45, en relief avec des lunettes à polarisation circulaire (realD, dans mon cas), j'ai trouvé le film plaisant à regarder. N'étant pas un féru de SF ni d’héroïc-fantasy, les espaces que parcoure le marine et son avatar avaient une certaine fraicheur... mais rapidement, on se rend compte que ce graphisme est plus emprunté à Final Fantasy X par exemple, que réellement créé. Les îles volantes se retrouvent dans nombres de BD, films, romans,  et illustrations traditionnelles ou concept arts ; leur design n’est pas original ; c’est bien dommage, il y avait tant à faire dessus ! Il en va de même pour les machines, réchauffées de Terminator, ou des Na’vis trop anthropomorphes…
De la même façon, on remarque dans l’histoire que la création de cette planète reste effleurée, à cause des rapports qui régissent les êtres qui y vivent.

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James Cameron, scénariste, a créé un monde peuplé de bêtes extraordinaires, une espèce unique ayant le don de la pensée : les Na’vis. Cette espèce est composée de mâles et de femelles, comme chez nous… Bref, des humains à la peau bleue, de trois mètres de haut, des oreilles pointues, et une queue de félin. Ils arborent des perles dans les cheveux, des colliers, des bracelets, quelques tissus. Ces accoutrements rappellent fortement les tribus indigènes ou amérindiennes… Ils dorment dans des sortes de hamacs, sautent de branches en branches, chassent avec des flèches, ont des rituels et des chants… Comment ne pas faire l’analogie avec nos propres tribus « sauvages » ?
La faune qui tourne autours d’eux est essentiellement hostile, peuplée d’hexapodes (six jambes) dont les loups vipérins, les Tytanosores-marteaux à carapace ou les Thanator. Une certaine beauté de la nature transparait pourtant, au travers de cette hostilité, notamment lorsque l’on voit le loup vipérin avec ses petits. Les Na’vis ont « soumis » certaines de ces espèces comme l’Equidius, une sorte de cheval qu’ils montent, ainsi que les Banshees, dragon avec lesquelles ils volent.
Les Na’vis ont  foi en un arbre appelé Utraya Mokri, arbre des âmes, et en ces graines qui sont dispersées par le vent ; ils interprètent la présence de ces Woodsprites comme des signes divins.
La nuit, la nature et les petits animaux sont luminescents, ce qui crée de belles atmosphères pour les spectateurs.

Loin de moi l’idée d’éplucher Avatar de A à Z, surtout en ne l’ayant vu qu’une fois. Je vous propose ici quelques symboles que j’ai relevé et qu’il me semble intéressant de mentionner. Tous les articles que j’ai lu sur le film ne parlent que de la technique, et oublient le plus important : le contenu.

Ce récit est à la base une quête initiatique, d’un homme détruit, qui en se transférant dans un avatar de Na'vis renait et grandit au fil de l’histoire. D’un Na’vis maladroit, il va devenir un guerrier qui convaincra le chef même de l’aider à mener une guerre. En cela, le récit respecte les 31 étapes du conte de Propp. A l'heure où le structuralisme a cherché à comprendre les 'grands mécanismes' de tous ce qui se trouve sur terre, à l'heure ou Freud a déblayé la psychanalyse, à celle où Joseph Campbell écrit le héros aux mille et un visages avec un corpus touchant aux récits des origines, Vladimir Propp cherche à retrouver les points communs aux contes : il en dénombre 31. Les 12 étapes du héros définies par Joseph Campbell dans son ouvrage sus-cité reprend quelque peu différemment ces 31 segments. Il n'y a pas de problème de savoir qui est le vrai père de cette découverte, puisque tout est extrait du corpus choisi, les contes en ce qui nous intéresse. Ces derniers étant des parcours initiatiques, le rapprochement que j'ai fait avec Propp venait de soi.

Le nom de la planète, Pandora, est déjà prédestiné en lui-même ! Sous le couvert d’une boite remplie d’un fabuleux trésor, lorsque les humains font « sauter le couvercle », toutes les bonnes choses auxquels ils aspiraient se dispersent et ils se retrouvent sous le regard de l’hostilité la plus totale qui leur coutera de partir.

James Cameron a conçu sa planète comme un réseau symbiotique, qui fonctionne comme le système nerveux d’un crâne humain, ou plus simplement, comme internet. C’est à dire qu’un Na’vi peut se brancher sur une créature pour la piloter ; quand il meurt, ses souvenir sont transmis aux arbres et tous peuvent les consulter. Toutes ces informations demeurent éternelles et confèrent à la personne décédée une sorte d’immortalité.  On retrouve là toute la préoccupation actuelle sur le réseau. Cameron le montre bénéfique pour tous, car c'est un réseau non égoïste qui permet aux Na’Vis de vivre dans la simplicité et une sorte d’innocence primordiale. Les humains, quant à eux, pilotent des Na’vis qui peuvent aussi bénéficier du réseau ! L’avatar est une interface, un chemin d’accès au réseau vital de la planète Pandora.
Or, alors que le réseau est visuel entre les Na'vis et le monde qui les entoure, ces derniers communiquant par ce qui ressemble d'abord à une fine queue de cheval, il est intellectuel entre les pilotes et leurs avatars, voire inexistant entre les humains et les extra-terrestres.

La relation qui lie les êtres sur Pandora est à l'opposée de celle que nouent les hommes avec l'extra-terrestre liquide qui se trouve sur la planète Solaris**. Dans ce dernier cas, c'est un seul extraterrestre qui occupe toute la planète. Ici, les Na'vis peuvent se connecter avec les animaux ou les plantes, mais ils peuvent aussi se déconnecter de ces derniers, lorsque cette connexion n'est plus nécessaire. On commence par comprendre le coté utilitaire de la chose, pour prendre un cheval, un dragon, ou pour communiquer avec les morts. Mais ce côté est mis en branle car, hormis pour consulter les souvenirs des trépassés, un Na'vis ne peut utiliser qu'un seul équidius ou qu'un unique banshee... à vie. En conclusion, ce rêve de réseau total n'est finalement pas achevé. Même si les arbres communiquent les uns avec les autres, cette communication reste muette en direction des Na'vis. Finalement, on peut penser que le réseau entre plantes n'a pas été mis en place par les Na'vis eux-mêmes, mais qu’ils se sont greffés sur celui-ci pour profiter du flux d’informations !
Etant donnée l'utilisation de l'animal par le Na'vis, on peut se demander si ces derniers sont vraiment consentants : une fois qu’une des antennes de leur monture terrestre ou ailée est branchée aux nerfs  situés dans la natte d’un Na’vis, c'est au pilote de le guider car l’animal n'a plus aucune volonté, et un joueur en ferait de même avec un jeu vidéo. On peut voir ces animaux comme des objets d'un langage de programmation orienté objet, du type de C++. Et de ce fait, on pourrait considérer l'avatar piloté par un humain comme un logiciel pirate.

L’arbre de la vie, quant à lui, est un symbole récurrent dans diverses mythologie et croyances de la Terre. Pour des informations plus détaillées, je vous conseille de lire les ouvrages écris par le roumain Mircéa Eliade. Cependant, pour résumer cela en quelques grandes lignes, l’arbre de vie, est l’axe du monde qui permet aux hommes de rejoindre les cieux et de discuter avec les divinités : c’est le lien entre le ciel et la terre, l'arbre est source de vie. Mircea Eliade, dans son Traité d'histoire des religions écrit que "la source de vie se trouve concentrée dans ce végétal ; donc que la modalité humaine se trouve là à l'état virtuel, sous forme de germes et de semences." L'arbre, symbole de l'immortalité, traduit le caractère cyclique de l'évolution cosmique par la mort et la renaissance de ses feuilles. Il est ainsi le symbole de l'éternité.

Cependant, des choses très importantes ne sont qu’effleurées dans ce film. Un meilleur développement lui aurait donné plus de saveur  dans les relations qu’entretiennent les personnages avec la nature pandorienne.

Deux exemples.

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L’image se situe au moment où Jake se prépare à être un chasseur Na’vis complet. Pour franchir cette ultime étape, il doit choisir un banshee afin de se l’approprier comme monture. Le banshee doit aussi choisir Jake. Je n’extrapolerais pas sur la voiture aux états unis qui est à priori acquise dès 16 ans, objet de déire, de convoitise et surtout, qui symbolise le passage à l’âge adulte !

Au début du film, nous nous sommes familiarisés avec les banshees, puisque nous les avons croisé une fois, au moment où, dans la jungle, Neytiri a appelé son banshee, donné quelques explications à Jake et elle est partie avec : un banshee n’accepte qu’un seul cavalier et il ne faut pas les regarder dans les yeux. Nous voilà prévenu !

Lorsque Jake est confronté à cette étape pour être accepté par tous, on lui dit que lui et le banshee se reconnaitront. A la question qu’il pose, à savoir « comment saurais-je s’il m’a reconnu ? » Neytiri lui répond : « C’est simple, quand il t’aura reconnu il voudra te tuer. ».

Certes. Mais à entendre cette réplique (et la suivante : « ça me rassure vachement ») je reste un peu sur ma faim… ceci reste un point de vue personnel, je vous explique pourquoi : Tout d’abord parce que nous sommes dans une nature sublimée, et l’approche entre ces deux êtres symbiotiquement liés ne devrait pas être un conflit de cet ordre mais plus une forme de séduction mutuelle. Ensuite – je vais développer cette partie – du point de vue de l’utilité du banshee.

Si nous observons cet animal, nous voyons que ces dragons ne servent que de véhicules. Les Na’vis se déplacent à pied, à cheval ou à dos de dragon, sans vraiment rien leur donner en retour. Aussi, ce lien entre le banshee et le Na’vis génère un combat inutile.
Il aurait été utile si, dans le cours du film, Jake avait été pris par un dilemme : qui sauver, du banshee ou de la fille ? Si je sauve le banshee, je peux rentrer, mais la fille meurt, par contre, si je sauve la fille, je ne peux plus rentrer… De cette façon, par exemple, le lien entre la vie et la mort aurait une utilité, ne faisant pas de ce combat un banal rodéo.

*

Le second exemple, comme le montre l’image ci-dessous, concerne le rapport entre l’avatar de Jake Sully et les Woodsprites, car Jake est sauvé deux fois par ces derniers. Cet exemple nous amènera ensuite à parler de la caractérisation dudit personnage… mais n’anticipons pas.

C’est dans sa journée initiale sur Pandora, alors qu’il s’est perdu et qu’il est observé par une Na’vis qui le tient en joue (Neytiri) qu’il est sauvé la première fois. Au moment où elle va pour lui décocher une flèche, un (une ?) Woodsprite passe devant l’humanoïde et s’arrête doucement sur la pointe de l’arme : elle ne tire donc pas. Ce court passage apprend au spectateur que ces graines sont sacrées aux yeux des Na’vis (indiquant sinon ce qu’il faut faire, du moins ce qu’il ne faut pas faire).
Aussi, lorsque le soir, après un combat avec les loups vipérins, Jake est ramené dans la tribu de cette femme, il est pris d’assaut par ces graines. Son réflexe, humain, est de s’en débarrasser alors que nous, spectateurs, connaissons le coté divin desdites graines. Comme Jake n’est pas encore tout à fait admis par la tribu, nous prévoyons ce que serait un mouvement brusque vis-à-vis de ces woodsprites.
Si Jake et Neytiri n’étaient pas tout deux en pleine dispute, cette apparition n’aurait pas porté le film à mal. Du fait que Jake soit poussé dans ces retranchement et n’ait plus d’arguments à répondre à sa partenaire, et que tout d’un coup les woodsprites arrivent et entourent l’avatar, fait très Deus ex machina, dieu hors de la machine – comprenez que le scénariste intervient pour régler la dispute.
Si Cameron a voulu faire de cette arrivée un nouveau conflit, plus grand parce que cette fois Jake s’en prend à une divinité sans le savoir, il n’y est pas arrivé. De mon point de vue – et je suis loin d’avoir autant d’expérience que lui – il m’aurait semblé préférable qu’il y ait un changement d’attitude réel de Neytiri. Ce changement se produit déjà, mais seulement – trop – partiellement. De plus, il aurait fallu que les graines soient montrées comme agressive, ou que Jake soit vraiment agressif avec elles : il fasse plus que s'épousseter. Ainsi, le conflit aurait été plus fort entre les trois entités protagonistes de cette scène, et l’aboutissement aurait pu amener logiquement ce qui suit, sans que l’action ne donne l’impression d’être parachutée.

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Une autre chose m’a dérangé dans ce film, c’est la caractérisation de Jake Sully, pas seulement dans son rapport avec les Woodsprites. Même s’il a une infirmité prononcée, il reste un bon américain moyen. Dès que son infirmité est abandonnée au profit d’un avatar qui marche, ce n’est plus le même homme (normal me direz-vous, c’est un extra-terrestre) et il a tout de suite acquis le potentiel de cette espèce Na'vis. Tout de suite, avec ce plein de sensations, il n’a plus rien à faire des ordres humains et il renvoie bouler sa hiérarchie pour sortir faire un footing. Je conçois que cette expression de la personnalité puisse plaire à un public plus jeune (autour de 16 ans) mais ce n’est franchement pas crédible… et comme il est tout de suite du coté de son avatar… ça coud de fil blanc la suite du film.

Il aurait été plus intéressant que ce personnage soit devenu méchant, presqu’acariâtre, et doté d’un humour tranchant, à la suite de son infirmité, comme la pluparts de ceux qui sont revenu du Vietnam par exemple. Jake a perdu l’usage de ses membres inférieurs lors d’un combat, mais depuis il se fait rejeter par tous et serait donc devenu comme tel. Il a une appréhension à utiliser le second corps de son frère, puisque se dernier l’a rejeté car il possédait pour sa part encore toutes ses facultés physiques ; puisque Jake est ici sur Pandora, c’est à cause de l’investissement qu’a représenté l’avatar : aussi il est là à cause de ce que le film veut combattre (l’argent, c’est le mal, nous dit-il en substance) : autant que ce soit contre son gré. De même, qu’on lui donne de la documentation pour qu’il connaisse l’espace dans lequel il évoluera, et qu’il les rejette parce que… il n’aime peut être pas lire, simplement.

Quand il pilote l’avatar, il suit ce qu’il doit faire, mais il y met de la mauvaise fois. Il se perd, comme dans le film, mais il reste violent contre cette nature qui pourrait bien le lui rendre. Neytiri découvre l'avatar, le vise et voit le Woodsprite qui tombe sur le tranchant de la pointe de sa flèche, comme ce qui se passe réellement dans le film. Petit à petit, Jake apprend par la suite à déchiffrer ce peuple. Peut être même qu’il le comprend au moment qui vient après sa lutte avec les loups vipérins, moment où, après que Neytiri lui a éteint sa lampe torche, il veut la tuer. Tout s’éclaire comme ce qui est montré dans le film, et à ce moment là, il s’arrête et commence à voir... On pourrait mettre en rapport cette découverte supposée avec les longs plans de désert qui s'enchainent en travelling dans Lawrence d'Arabie, qui montrent que le protagoniste en tombe amoureux, et qu'il se met à le comprendre : dans Avatar, les parachutes de l’arbre Utraya Mokri se posent à ce moment sur Neytiri, Jake s'éloigne et il découvre que la nature a pris des couleurs.
Cette caractérisation aurait présenté un personnage double, sombre, qui s’éclaire comme les nuits que connait Pandora.

Ceci nous amène à la caractérisation du corps de l’avatar, qui, vêtu de chair et d’os aurait pu avoir une vie propre. Je ne reviendrais pas sur son anthropomorphisme, évoqué au début de ce billet. L'avatar est donc constitué de l’ADN de son frère, mais, on oublie cette donnée dès que Jake est dans l’avatar. C’est dommage, car il y aurait pu y avoir quelque chose de très fort dans cette relation : le frère aurait pu laisser, par exemple, des réflexes au corps de son avatar, et Jake qui n’a pas les mêmes réflexes doit lui faire faire une rééducation et apprendre à maîtriser son corps handicapé, celui de son frère, et celui de l'avatar qui rejoint les deux corps par la même occasion. Je lance mes idées, car cet avatar fait cohabiter trois personnes que sont Jake, son frère et l'avatar lui-même. Si l'on reprend la caractérisation de Jake évoqué ci-dessus, il aurait du mal à être dans sa peau au début, étant 'dans celle de l'avatar', donc d'un réel ennemi, et 'dans celle de son frère' qu'il ne pouvait plus encadrer. Ceci aurait donné un regain d'intérêt à l'histoire.

Enfin...

La dernière chose qui m'a surpris, c'est la fin. Non pas la fin en elle-même, prévisible dès le début. Mais cette fin qui se met dans l'axe d'autres fins d'autres films américains. Je souhaite restreindre mon corpus d'étude à ce continent.
Donc, une fois l'esprit de Jake totalement déplacé dans l'avatar, avec Neytiri, ils se marièrent... et eurent beaucoup d'enfants. La fin est heureuse, tout rentre dans l'ordre : les extraterrestres avec les extraterrestres ; les humains retournent d'où ils viennent avec les humains. Je n'ai pas l'intention de critiquer, mais d'observer, à partir de ce film, et aidé par d'autres (surtout Shrek), quels sont leur points communs.
La 31ième étape du conte, telle que définie par Vladimir Propp, consiste en : le mariage. Après avoir surmonté toutes ces épreuves, c'est le moins que le héros puisse avoir en récompense !
Mais ce qui est frappant, c'est que dans les deux cas suscités (comme d'autres), on ne se mélange physiquement pas. Jake reste Jake avec un corps bleu. De même dans Shrek, la princesse reste une princesse avec un corps vert. Mais ces deux corps s'accordent avec celui de l'autre : Shrek est vert, comme Neytiri est bleue.
Ce qui est intéressant, c'est de se rendre compte, avec ces deux cas, que finalement l'amour tiendrait compte de l'apparence. Avec un truc de scénariste, Cameron aurait pu faire vivre un Jake humain parmi des extraterrestres bleus, mais il n'a pas choisi cette option. De même, c'est encore plus clair dans Shrek, la princesse rompt avec la beauté phénoménale qu'elle pouvait avoir, afin d'être "laide" dans l'objectif d'être la femme de cet ermite de Shrek.
Je vais m'attarder quelque peu sur l'exemple de Shrek, car mis en parallèle avec Avatar, il se révèle plein d'enseignements, du fait que l'âne se marie avec une dragonne. A cette occasion, ni l'âne ne devient dragon ni la dragonne ne se métamorphose en ânesse. Il y a donc ici un mariage entre deux personnages fondamentalement différents. Mariage qui aura des suites, puisque nous verrons de petits ânes-dragons... Contre exemple parfait, puisque cette relation s'éternise.
Contre exemple parfait, si l'âne et la dragonne avaient été les protagonistes principaux de l’histoire. Mais l'âne est caractérisé comme comique, à la fois parce que grand baratineur et aussi grand trouillard, angoissé à l'idée de l'inconnu. C'est le personnage qui fait rire à ses dépends. Puisqu'il n'atteint pas au respect, on peut en conclure que l'âne s'est trompé dans ces choix de vie.

Aussi, si nous nous concentrons sur les protagonistes - et, comme je vous l'ai démontré, bien après que les noirs aient été introduits dans les films avec parfois avec des rôles similaires aux héros (ça change du fait qu’ils meurent souvent en premier dans les films d’action…) - cette différence de couleur persiste. Que veut-elle dire ? Plusieurs solutions sont recevables, suivant notre point de vue :
- La première serait qu'un humain ne peut avoir de relations sexuelles avec une Na'vis donc que l’union inter-espèces ne tiendrait à rien.
- La deuxième serait qu'une fois transformé, Jake ne peut plus revenir en arrière, et redevenir un humain... même s'il en avait envie.
- La troisième, qui semble la plus plausible et que l’on constate dans la majorité des films US, et que moralement, dans l’ordre des choses, cela ne se fait pas : les blancs restent avec les blancs, les bleus avec les bleus ! On ne mélange pas les torchons et les serviettes, bon sang ! La morale est sauve ! Je vous rassure, Cameron nous avait fait le même coup avec Titanic ! Le héros, d’une classe sociale inférieure meurt, car cela ne se fait pas pour une demoiselle d’un rang élevé de finir avec un pauvre. C’est contre les conventions et le puritanisme.

Car, si Neytiri avait réellement aimé Jake, pourquoi n'aurait-elle pas admis sa différence ? Elle qui passe son temps à dire qu’elle « voit » et lui non… Finalement, elle non plus ne voit pas plus loin que le bout de son nez ! Elle en reste à l’apparence ! D’ailleurs, les Na’vis ne sont pas dégoutés de voir des clones de leur espèce pilotés par des extra-terrestres ??? Le récit s'achève sans répondre à ces questions. C'est peut être le sujet d'un autre film, mais leurs réponses auraient tout de même pu être incorporées au film (à 2h45, il n'en était plus à une ou deux scènes près) : la question que je me pose, en voyant ce film, et avec toute ma culture cinéphilique, c'est pourquoi la couleur ressemble-t-elle actuellement encore à une barrière ?

En conclusion, ce film ne restera hélas pas dans les mémoires, sinon dans le Guiness Book pour son coût exorbitant. Je ne suis pas en train de dire que l'argent ait été employé à mal, car la 3d est d'un réalisme à couper le souffle. Comme beaucoup de magazines le disent, Cameron a fait franchir un pas au réalisme en relief. Mais l'histoire est loin de suivre. Oui, Cameron est un grand metteur en scène, mais cette histoire lui est si peu personnelle (les réponses aux questions qu'il pose au travers de son scénario sont si inexistantes) que ça reste un film de fantasy comme un autre (et encore, grâce au relief, il échappe de peu à la catégorie Nanars !) - et pourtant, je n'en ai pas vu beaucoup ! Les grands hommes bleus ne seront plus des grands schtroumpfs, mais des Na'vis... si leur nom n'est pas effacé avec le temps. Et je le regrette.

Enfin, voici le trailer !


AVATAR - BANDE-ANNONCE VF - JAMES CAMERON

 

* Les 31 étapes du conte, Vladimir Propp ; Le héros aux mille et un visage, Jospeh Campbell ;
**Solaris, un roman de Stanislav Lem, adapté au cinéma par Andreï Tarkovski puis par Steven Soderberg

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Commentaires
J
Salut,<br /> ton analyse du film est très complete et pertinente sur plusieurs points, mais de la à dire qu'il ne restera pas dans les mémoires, je dit faut.. Il ne restera pas dans la tienne, peut etre, mais ne generalise pas.<br /> Apres avoir vu deja 4 fois le film en 3D, et apres avoir parlé avec d'autres spectateurs, avant et apres la projection, j'ai remarqué qu'un grand nombre avaient vécus ce film, non pas qu'avec les yeux, mais avec leur coeur. C'est une film qui permet a chacun de voir un monde de symbiose et les gens en ont bien besoin. D'apres les avis collectés en live apres chaque projection, ce film restera bien dans les mémoires, c'est une certitude.
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